Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14 novembre 2023

La tête froide

carnet,note,journal,autobiographie,publication,parution,édition,christian cottet-emard,écriture,littérature,sur un sentier recouvert,blog littéraire de christian cottet-emard,orage-lagune-express,journal intimeAprès le premier volume, Prairie Journal, paru en 2016, la publication du deuxième tome de mes carnets, Sur un sentier recouvert, arrive plus tôt que prévu. Je vais encore entendre ou lire quelques reproches (complaisance narcissique, nombrilisme). Ces critiques me sont le plus souvent adressées par des personnes qui considèrent mes livres du haut de leurs préjugés, qui les lisent en diagonale ou qui ne les lisent pas du tout. Comment être encore narcissique à soixante-trois ans  ? Si quelqu'un a la recette, je suis preneur  !

Quant au nombrilisme, le nombre de pages consacrées à des sujets de société et d'actualité me semble démentir cette accusation. J'ajoute quand même que si je me résous à traiter parfois ce genre de sujets, ce n'est pas vraiment par plaisir car je ne suis plus journaliste, ce métier qui m'a déplu. 

Les livres ont souvent un curieux destin, parfois celui d'être achetés sans être lus. Je me rappelle un ami peintre hélas décédé qui faisait une visite annuelle à la librairie de sa bourgade pour se procurer tous les grands prix littéraires de l'année afin de les offrir en cadeau de Noël à son épouse. Elle m'avait confié qu'elle n'en lisait souvent qu'un seul, extrait de cet encombrant paquet cadeau, parfois aucun. Heureusement, le couple vivait dans une immense maison avec les possibilités de stockage qu'on imagine.

Cette anecdote me semble révélatrice de l'écart entre la réalité de l'édition et la perception qu'en a le grand public. Beaucoup de livres sont imprimés, publiés et expédiés chez les libraires dans des cartons qui ne sont pas ouverts puis renvoyés plus tard à leurs expéditeurs. Cela paraît absurde mais il existe pourtant une logique économique, certes perverse, à cette aberration. En tant qu'auteur, il m'est arrivé comme à d'autres d'en faire les frais.

C'est la raison pour laquelle j'observe avec satisfaction et intérêt toutes les innovations technologiques entraînant de profondes mutations dans l'industrie du livre avec les conséquences prévisibles sur la diffusion, la distribution et la vente. Je connais des auteurs dans la même situation que moi qui déplorent cette évolution. Je me demande pourquoi ils défendent bec et ongles un système qui les malmène ou les ignore. Moi, je m'en réjouis car je n'ai plus l'âge (et le souhait) d'attendre des mois ou des années la bénédiction d'un inconnu retranché derrière sa pile de manuscrits et la signature d'un improbable contrat qui me sera de surcroît défavorable d'un point de vue financier, qu'il s'agisse d'un grand ou d'un petit éditeur. Je me reproche d'avoir attendu si longtemps avant de consentir enfin à garder la tête froide.